L'Ille-et-Vilaine: između Armour-a i Argoat-a: izvještaj

Necentrično srce, nekadašnja tržnica Bretanje, regionalni ulaz, ovaj odjel između kopna i mora bogat je raznolikošću. Poludrvene, blatne ili kamene kuće. Longères, vlastelinstva, primorske vile. Sorta koja odražava onu od terroira koji je čine.

C’est le seul département breton tenant son nom de deux cours d’eau qui s’unissent à Rennes : la Vilaine (fleuve côtier de 225 km) et son principal affluent l’Ille. Cette appellation liée au réseau hydrographique contraste avec le Morbihan (“petite mer”), le Finistère (“fin de terre”) et les Côtes-d’Armor. Ouverte sur la mer (100 km de littoral environ), l’Ille-et-Vilaine s’apparente à une terre de transition entre Bretagne, Normandie et pays de Loire. Prairies, bocages, cultures fourragères traduisent sa ruralité tandis que landes, forêts, estuaire, canaux, villes d’art et d’histoire, châteaux et manoirs témoignent de sa diversité. Cette porte de la Bretagne abrite quatre régions marquées par une identité, des paysages et des types d’habitat spécifiques : les Marches de la Bretagne (Vitré et Fougères), le pays de Saint-Malo et Dinard, le pays de Vilaine et Redon, le pays de Rennes.

Aux marches de Bretagne. Une frontière fortifiée

A la charnière du duché de Bretagne et des grandes principautés féodales, les marches de Bretagne ont formé jusqu’au xVIe siècle une frontière militaire âprement disputée. Dès le XIe siècle, seigneurs et barons édifient de puissantes citadelles pour défendre leur autonomie et endiguer les velléités expansionnistes des Anglais comme des rois de France. Places fortes de granit, Fougères et Vitré deviennent de redoutables gardes-frontières mais aussi des carrefours commerciaux très actifs. Toutes deux classées villes et pays d’art et d’histoire, ces “Carcassonne du Nord” conservent un riche patrimoine architectural. Granitique au nord, schisteux au sud, le pays de Fougères déroule de vertes prairies coupées de haies vives et ponctuées de bois que traversent quelques vallées encaissées.

Au sud-est, au carrefour de la Bretagne, de la Normandie et de l’Anjou, le pays de Vitré livre des paysages de prairies vallonnées et de cultures (blé, maïs, pommes de terre… ). Le château aux murailles impressionnantes de Vitré épouse le contour triangulaire de l’éperon qui le porte. La ville est enclose dans des remparts qui abritent de belles maisonsmédiévales et des hôtels particuliers de style gothique et Renaissance. L’abondance des forêts alliée au savoirfaire des charpentiers a favorisé la construction à pans de bois jusqu’au XVIIe siècle. Malgré les incendies et l’urbanisation (XIXe siècle), cet habitat reste présent notamment à Vitré, Fougères, Bécherel, Dol-de-Bretagne.

Le bois doyen des matériaux
Les plus anciennes maisons (XVe et XVIe siècles) sont dressées en pignon à la perpendiculaire de rues étroites pour s’adapter à l’exiguïté des villes corsetées de remparts. Elles sont formées d’une ossature de chêne élevée sur un rez-de-chaussée maçonné qui les isole de l’humidité du sol et limite la propagation des incendies. Y prennent appui des poutres et des poteaux qui portent les étages. A l’intérieur de ces cadres, les charpentiers fixent des pièces en oblique (les “écharpes”) pour les raidir et empêcher les déformations.

Le manque d’espace dans les villes closes explique les encorbellements : une technique consistant à faire “déborder” les étages supérieurs pour accroître la surface habitable. Des contreventements (en chevrons, damier ou croix de Saint-André) participent à la stabilité des bâtisses et animent leurs façades. Bâties sur des parcelles restreintes (30 à 50 m2), elles sont couvertes de toitures pentues parfois en forme de carène de bateau.A partir de la Renaissance, la décoration des façades (fleur de lys, personnages… ) va de pair avec l’enrichissement des marchands.

Le pays de Saint-Malo. De cités corsaires en cités balnéaires

Fenêtre ouverte sur la Manche, le pays malouin occupe le quart nord du département, de Combourg à Cancale en passant par Dol-de-Bretagne, Saint-Malo et Dinard. Forêts, prairies, cultures et marais se partagent l’espace de l’arrière-pays qu’entaille l’estuaire de la Rance relié à Rennes par le canal d’Ille-et-Rance. Porte ouverte sur l’Océan, frontière naturelle et voie de communication, la Rance était jadis sillonnée de gabares chargées de bois, de draps ou de blé. Comme les abers du Finistère, elle crée une atmosphère marine mais à l’abri des embruns, où eaux douces et salées se mêlent (rias), où se nichent au creux des criques, ici des bourgs, là une ferme isolée.

Si le littoral ne compte que 70 km de côtes, il égrène une grande variété de paysages qui lui vaut l’appellation de côte d’Emeraude. Que de contrastes ainsi entre les falaises de Cancale, la zone portuaire de Saint-Malo, la station balnéaire Belle-Epoque de Dinard ou l’ancien village de pêcheurs de Saint-Briac jadis prisé par les peintres Auguste Renoir et Emile Bernard.

Ville close ouverte sur le monde
Bâtie derrière d’épais remparts cernés par la mer, Saint-Malo exerça son pouvoir sur le monde. Indépendants et entreprenants, ses habitants ont dès le XIIe siècle délaissé leurs filets pour conduire les Croisés en Orient. Dotée de franchises, Saint-Malo affirme sa vocation maritime (commerce des épices, huile et toiles), se lance à la conquête de terres lointaines (en 1534, Jacques Cartier découvre le Canada), organise les campagnes de pêche à la morue vers Terre-Neuve… En 1590, la bourgeoisie d’affaires refuse de se soumettre au roi protestant Henri IV et érige la cité en république.

Devenue le premier port de France, elle traite d’égal à égal avec les banquiers de Louis XIV - soucieux de renflouer les caisses vidées par d’interminables guerres. Ville de corsaires, au XVIIIe siècle, elle pratique la “guerre de course” et s’empare - sur ordre du roi - de la flotte marchande anglaise. C’est également l’époque des écumeurs de mer dont Surcouf est l’une des plus célèbres figures. Détruite en 1944 à l’exception des remparts, Saint-Malo a été en grande partie reconstruite.

Hôtels particuliers et malouinières
De 1710 à 1740, Saint-Malo connaît un essor spectaculaire. Enrichis par le commerce avec l’Espagne, les colonies et la guerre de course, les armateurs achètent des terrains où ils font édifier des hôtels particuliers. Bâtis en pierre de taille (granit de Chausey), ils dressent d’imposantes façades à deux ou trois étages, ajourées de grandes fenêtres très symétriques que couronne une toiture d’ardoise exagérément haute d’où s’élancent de puissantes souches de cheminée. Conçues par travées, les façades sont traversées de lignes horizontales (bandeaux, plinthes… ) qui dissocient les étages et tempèrent l’austérité du granit. De même, quelques balcons en fer forgé atténuent l’ordonnance sévère des appareillages. Précédé d’une cour d’honneur et ouvert sur un jardin, l’hôtel malouin assure plusieurs fonctions : refléter le rang social du propriétaire, offrir un cadre de réception et de négociations commerciales, apporter des revenus complémentaires par sa mise en location quand armateurs et négociants préfèrent s’établir dans l’arrière-pays.

C’est dans un rayon de 12 kilomètres environ autour de la cité corsaire que ces “Messieurs de Saint-Malo” se font bâtir des villégiatures appelées “malouinières”. Influencées par l’architecture classique (XVIIe et XVIIIe siècles), elles se caractérisent par lasymétrie des baies, des encadrements, chaînes d’angle et lucarnes à fronton en granit. De plan rectangulaire, elles élèvent de hautes façades à deux niveaux qui s’étirent sur trois, cinq ou sept travées, laissant deviner de généreux volumes. En contraste avec cette architecture sans ostentation, la décoration intérieure fascine. Evidemment, puisque de leurs voyages, les armateurs rapportaient des merveilles : du bois des îles pour fabriquer les parquets et le mobilier, des porcelaines de la Compagnie des Indes, du marbre d’Italie pour les manteaux de cheminée.

La mode des bains de mer
A la fin du XIXe siècle, le littoral devient le lieu d’élection de la bourgeoisie anglaise et parisienne. Emerveillées par l’estuaire de la Rance, des familles anglaises et américaines décident la construction de villas face à la cité de Saint-Malo. Dinard, bourgade de pêcheurs, devient la “Biarritz du Nord”, attirant une colonie anglaise qui y trouve son port d’attache. Banquiers et hommes d’affaires achètent des parcelles bientôt couvertes de villas, grands hôtels, théâtre, thermes, etc. Autour du casino et de la gare, des avenues sont tracées tandis que l’on aménage, ici des cabines de plage, là une promenade suspendue entre les rochers et la mer. Edifiées entre 1860 et 1910, les villas rivalisent d’éclectisme et de fantaisie. Influencés par le régionalisme, les architectes revisitent les styles : néo-breton, néo-gothique, anglonormand…

Refusant la ligne droite et la symétrie, préférant la multiplication des volumes et l’imbrication des toits, ils ajoutent tourelles, colombages, toitures à fermes débordantes. Les villas, manoirs, castels, chalets… aux belles proportions sont ainsi dotés de bowwindows, fenêtres néo-gothiques, vérandas, pignons et lucarnes décorées de vitraux, mosaïques, frises d’émaux… . Des touches Art nouveau ou Art déco les agrémentent parfois (la villa Fantasia). Alentour, des villages
(Saint-Lunaire, Saint-Briac… ) profitent de cet engouement, attirant des artistes peintres (Renoir, Emile Bernard, Signac… ).

Le pays de Vilaine. Ici la pierre joue de ses nuances

Niché dans le sud-ouest du département, ce terroir voisine avec la Loire-Atlantique et le Morbihan. Encore appelé pays de Redon, il occupe le bassin de la Vilaine,fleuve côtier qui le traverse du nord au sud. Bocages, vallons boisés de pins et châtaigniers, cultures, prairies, landes (genêt et bruyère), marais ponctués de roselières, tourbières, saules et peupliers, s’y partagent l’espace. Etagée sur la rive droite de la Vilaine et bordée par le canal de Nantes à Brest, Redon en est la capitale et le carrefour. Ancien centre religieux et politique, la cité est influente au Moyen Âge grâce au rayonnement de son abbaye fondée en 832, à ses foires et au commerce fluvial (sel de Guérande, vin, céréales, toiles… ).

Du logis à la longère
L’habitat type est une maison rectangulaire le plus souvent de plain-pied (“bloc à terre”). La façade principale est orientée au sud pour profiter du soleil et se protéger des vents du nord et des pluies d’ouest. Le fermier et sa famille vivaient dans une pièce unique (“pièce à feu”) regroupant la cheminée, la salle commune, une table, des bancs, un coffre et des lits. Séparée par un mur de refend, l’étable prenait place à l’une des extrémités. Au-dessus, le comble abrite le grenier à grains accessible par une lucarne “gerbière” desservie par une simple échelle ou un escalier extérieur.

A la fin du XVIIIe siècle, l’essor agricole (défrichement des forêts, mise en culture des landes vouées à l’élevage) favorise la dissociation de l’habitation et de l’exploitation. Des dépendances (granges, étables, remises… ) sont alors bâties dans le prolongement du logis qui prend l’aspect d’une “longère”. Par la suite, dans un souci de rationalité et d’hygiène, les autres dépendances sont placées à la perpendiculaire de la “longère”, formant une ferme dont la cour ouverte accueillait l’aire de battage.

Schiste et grès mêlés
Assis sur un socle de schiste et de grès armoricain, le pays de Redon égrène un habitat marqué par ces matériaux. Jusqu’au début du XXe siècle, maintes ardoisières et carrières locales étaient exploitées pour la production de pierres de parement, dalles et ardoises de toiture. Les façades des maisons sont ainsi appareillées en schiste souvent associé au grès (aux nuances rousses), pour les encadrements des baies et les chaînes d’angle. Clivé en dalle d’épaisseur variable, ce schiste (aux nuances gris bleuté, pourpres ou violacées) est mis en place avec des joints très fins qui laissent un aspect des plus graphiques.

Les façades sont percées d’ouvertures supportées par des encadrements en grès (gris clair ou rosé) ou en briques, couronnés par un linteau (bois ou grès suivant le niveau de richesse). Outre les ardoises de toiture, le schiste était utilisé pour créer des séparations entre les champs et les fermes sous forme de grandes dalles plantées dans le sol. Parfois, on utilisait aussi ces “palis” pour dresser des cloisons dans la maison, voire construire des dépendances (remises, écuries, porcheries… ).

Le pays de Rennes. L’art de bâtir en terre

Coeur du département, le pays de Rennes est une vaste plaine argileuse vouée aux cultures céréalières et à l’élevage. Dans un rayon de 20 à 25 km autour de Rennes, l’abondance de l’argile et la médiocrité de la pierre sont à l’origine d’un art de bâtir aussi spécifique qu’économique.

La terre matériau à tout faire
Appelée “bauge”, cette technique consistait à construire des maisons uniquement en terre crue par portions successives. Longtemps perçu comme synonyme de pauvreté, ce matériau est à l’origine de la construction de maints édifices “nobles” : manoirs, châteaux et dépendances (métairie, écurie… ), presbytères, “fermes modèles” conçues par les agronomes du XIXe siècle. A cette époque, les avancées techniques de construction en bauge permettent même le développement de bourgs “en terre” autour de Rennes. Pour “urbaniser” les façades de ces maisons, on applique un enduit puis un badigeon décoré de faux bandeaux, de faux chaînes d’angle et faux appareillages.

Un savoir partagé
Le chantier débutait en général à la finde l’hiver pour s’achever au début de l’été avec l’arrivée des grosses chaleurs (fin juin). Il exigeait une importante main-d’oeuvre (famille, fermiers voisins, bouvier… ) encadrée par un maçon, pour extraire la terre, émietter les mottes et collecter l’eau, la fouler au pied en incorporant des fibres végétales (genêt, bruyère, ajonc à l’origine puis paille de blé ou d’avoine… ). La terre prélevée sur le lieu même du chantier (lors du creusement d’une mare ou des fondations par exemple) était alors dressée à l’aide d’une fourche par “levées” successives (50 à 80 cm de hauteur et d’épaisseur). Auparavant, le sol était creusé pour y prévoir un soubassement en pierres maçonnées (schiste, granit). Ce “solin” (dont la hauteur révélait le niveau de richesse du propriétaire) apportait une fondation tout en isolant la bauge de l’humidité du sol.

La mise à l’aplomb
L’élévation des murs s’effectuait progressivement pour laisser durcir chaque couche. La bauge étant dressée sans aucun coffrage, le maçon devait “tailler” la surface des murs pour leur donner un parement d’aplomb. Muni d’une bêche à bord tranchant (la “paroire”), il montait sur l’épaisseur des murs pour dresser les parements. Il taillait d’abord les angles au jugé, à l’aide d’un fil à plomb ou en tendant des fils de part et d’autre des murs. Pour éviter qu’ils ne se fissurent en surface, il les battait avec une section de chevron (le “triquage”). Il pouvait ensuite monter une autre levée de terre avant de répéter l’opération. Le nombre de levées détermine logiquement la hauteur de l’ouvrage : six levées pour un logis de plain-pied; douze pour une maison de maître à deux niveaux.

Une architecture bien cadrée
A partir du XVIIIe siècle, les ouvertures des façades sont structurées par des cadres en bois chevillés placés au nu intérieur et extérieur des murs. Ces “carrées doubles” sont formées de quatre poteaux reliés par des entretoises (les “clefs”) que l’on règle en fonction de l’épaisseur des murs. Placés de part et d’autre des façades, ces cadres pouvaient être utilisés comme coffrage durant la construction de la maison avant de recevoir les menuiseries. Portes et fenêtres sont couronnées par des linteaux en bois (les “palatres”) tandis qu’à la base des fenêtres, on ajoute des appuis droits ou moulurés. Les maisons plus cossues présentent des encadrements en pierres de taille.

Ils s’inscrivent souvent dans une façade dont le rez-de-chaussée est maçonné pour en supporter la charge. Après 1850, les encadrements en brique se généralisent. Les murs reçoivent un enduit à base de terre argileuse tamisée ou de chaux et sable (le “jeti”). L’avancée de toiture (ou “coyau”), formée par des sections de chevrons placés à la base de l’égout, brise la pente du toit, éloignant ainsi la pluie des façades.

Reportage réalisé par Alain Chaignon.